Peut-on déposer une marque incluant le nom « Paris » ?

kues1 on Freepik

Nombreuses sont les marques enregistrées incluant, de manière plus ou moins centrale, le nom de la capitale.

S’il n’existe pas d’interdiction générale de reproduire dans une marque le nom « Paris » (ou celui d’autres communes ou collectivités), plusieurs obstacles peuvent empêcher leur enregistrement par l’INPI.

L’atteinte au nom ou à la renommée de la ville de Paris

La ville de Paris, en tant que collectivité territoriale, peut s’opposer à l’enregistrement d’une marque en s’appuyant sur les dispositions de l’article L711-3 du Code de la propriété intellectuelle :

« I.-Ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France, notamment : […]
Le nom, l’image ou la renommée d’une collectivité territoriale
« 

Il a ainsi été jugé que ne pouvait être enregistrée :

  • la marque « PARIS BY PARIS » pour des produits ayant trait à la mode, dans la mesure où la ville de Paris intervient activement dans le secteur de la mode et utilise son nom pour encourager et promouvoir la création, le développement et la diffusion des œuvres de mode. Pour les juges saisis, cette marque était susceptible de porter atteinte aux intérêts de la commune de Paris, le public pouvant être trompé sur la provenance des produits ou sur l’apparence de garantie officielle de ces derniers. Le « By » laissait en effet entendre une participation de la ville elle-même.
  • la marque « PARIS L’ÉTÉ », dans la mesure où cette marque porterait atteinte aux droits antérieurs dont dispose la ville de Paris sur son nom et le public pouvant être trompé en raison de l’apparence de garantie officielle du produit ou du service ou en raison de ce qu’il croit être sa provenance, mais également parce que ce dépôt prive la collectivité territoriale de la possibilité d’exploiter son propre nom pour identifier ses actions et en contrôler l’usage.

A été au contraire jugée valide la marque « JEUNES A PARIS » pour désigner notamment des services d’éducation, de formation, de divertissements, des activités sportives et culturelles; Le tribunal a considéré que ceux-ci « ne relèvent pas exclusivement des attributions municipales de telle sorte que le public n’est pas nécessairement amené à penser qu’ils sont proposés par la Ville de Paris ».

Ce dernier exemple démontre toutefois que la frontière semble très subjective entre ce qui peut ou non constituer une atteinte aux droits de la ville de Paris.

La place qu’occupe le mot « Paris » dans la marque apparait toutefois déterminante. Peu de chance de violer les dispositions de l’article L711-3 I° 9 susvisé si le mot « Paris » figure en petits caractères, en dessous d’un autre élément verbal dominant (comme c’est d’ailleurs le cas dans beaucoup de logos/marques du domaine de la mode ou du luxe). Il en sera autrement si, comme dans les exemples précédents, le nom de la ville est en position d’attaque, dominante, et les termes qui l’accompagnent sont faiblement distinctifs.

Le refus de l’INPI pour caractère trompeur

L’INPI peut également invoquer les dispositions de l’article L711-2 du Code de la propriété intellectuelle:

« Ne peuvent être valablement enregistrés et, s’ils sont enregistrés, sont susceptibles d’être déclaré nuls : […]
8° Une marque de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ;
« 

Est généralement considéré comme trompeur et refusé à titre de marque le signe pouvant désigner la provenance géographique d’une catégorie de produits, en tenant compte bien entendu des caractéristiques du lieu désigné et de la catégorie de produits concernée.

Ainsi, les marques qui, associées aux produits qu’elles désignent, peuvent être interprétées comme fournissant une information sur leur provenance géographique, seraient nulles si toutefois les produits en cause étaient d’une provenance tierce.

Le raisonnement est donc analogue à celui adopté par les juridictions dans certaines des décisions susvisées, qui évaluent ni plus ni moins que le risque pour le public d’être trompé par le nom de marque et son « origine ».

Pour certaines catégories de produits, l’INPI exige que soit adjointe la mention « tous ces produits sont d’origine française ou fabriqués en France » au sein du libellé (liste des produits ou service). Sont toutefois essentiellement concernées certaines classes de produits (03- savons et cosmétiques ; 14 – joaillerie ; 18 – parapluies ; 25 – vêtements…).

***

Pour toute problématique de droit des marques, vous pouvez me contacter à l’adresse nb@bressand-avocat.fr