Cass. civ 1ère du 8 février 2023, n°21-24.980.
En 2018, le groupe The Dø assignait les éditeurs du morceau « Goodbye » (2014) de DJ Feder, estimant que celui-ci contrefaisait leur chanson « The bridge is broken » (2008).
L’auteur de l’oeuvre « Goodbye » avait effectivement emprunté une séquence musicale présente en introduction de la chanson litigieuse.
Les quelques notes d’attaque de l’œuvre première (notes de guitare) avaient été samplées (ou échantillonnées, définition ici) pour être réemployées sous forme de boucle dans l’œuvre seconde.
Œuvre première :
Œuvre seconde :
Le caractère original de l’œuvre première, condition essentielle de la protection par le droit d’auteur, n’était pas contesté.
Du reste, les parties d’une oeuvre considérée comme originale peuvent également être protégées par le droit d’auteur si toutefois elles participent comme telles à l’originalité de l’oeuvre entière.
Toute la difficulté résidait donc dans la démonstration de l’originalité du seul extrait échantillonné et réutilisé (sample).
Pour les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, la séquence reprise ne figurait qu’en introduction de la chanson « The bridge is broken » et dans aucun de ses couplets, elle ne durait par ailleurs qu’une à deux secondes.
Cette séquence était, dans le morceau « Goodbye », un accord arpégé de l’accompagnement de guitare électrique principal de l’oeuvre, tandis qu’elle figurait uniquement dans le premier accord de la chanson « The bridge is broken ».
Cet extrait de l’œuvre première dont la reprise était reprochée ne constituait donc pas, selon les juges, un gimmick (quelques notes qui captent l’oreille de l’auditeur) ni un élément déterminant qui permet de caractériser la personnalité de l’auteur.
En somme, ledit extrait n’était pas à lui seul original et sa reprise ne pouvait donc être contrefaisante.
Faut-il supposer alors que le morceau constitué par la boucle formée à partir de cet extrait ne peut lui non plus accéder à la protection par le droit d’auteur ?
Cette reprise n’était pas davantage constitutive de parasitisme selon la Cour, dans la mesure où il n’était pas démontré que l’extrait en cause fut l’objet d’un savoir-faire ou d’investissements particuliers dont aurait profité sans bourse délier les auteurs et éditeurs du morceau « Goodbye ».
La Cour de cassation rejette enfin le pourvoi du groupe, relevant que la Cour d’appel a souverainement apprécié la valeur des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, et notamment des avis techniques qu’avaient sollicités les parties.