Droit au respect de l’œuvre et usage à des fins publicitaires

(CA Paris, 18 juin 2021, n°19/14268)

Par un arrêt du 18 juin 2021, la Cour d’appel de Paris a considéré que l’intégration d’une chanson dans la bande-annonce d’une émission de télévision portait atteinte au droit au respect de l’œuvre.

Faits

Pour promouvoir la version belge de l’émission The Voice, la chaîne RTBF avait utilisé un extrait de la chanson « Badminton » du groupe français ASTONVILLA.

Cet extrait avait été intégré, en fond sonore, à une vidéo « bande-annonce » de l’émission de télévision et publiée sur la page Facebook de la chaîne belge.

Les auteurs de cette chanson ont saisi les juridictions françaises, invoquant notamment l’atteinte à leur droit moral, et pus spécifiquement au droit au respect de l’œuvre dont jouit l’auteur en application de l’article L. 121-1 alinéa 1er du Code de la propriété intellectuelle.

L’auteur jouit du droit au respect […] de son oeuvre.

CPI, art. L. 121-1

Cette disposition permet à l’auteur de s’opposer aux :

  • atteintes portées à l’intégrité de l’œuvre, c’est-à-dire à la modification de son contenu ou de sa forme : découpage, agrégation ou autre altération matérielle de l’œuvre ;
  • atteintes portées à l’esprit de l’œuvre, qui s’entendent des utilisations susceptibles de déprécier ou de dénaturer l’œuvre en raison du contexte et de la façon dont elle est présentée ou diffusée (on parle d’atteintes « contextuelles »).

Solution

Pour se défendre, la chaîne belge soutenait que la chanson n’avait pas été modifiée et que son utilisation résultait d’un accord conclu entre les organismes de gestion collectives français (SACEM) et belge (SABAM).

L’argument n’a pas convaincu

Pour la Cour d’appel, « la reproduction partielle, entendue en fond sonore, sur un message publicitaire qui n’avait pas pour seul objet de promouvoir l’œuvre elle-même mais une émission sans lien avec elle et non autorisée par les auteurs, porte atteinte à leur droit moral d’auteur, dès lors que l’exploitation publicitaire n’était pas sa finalité artistiques ».

Le caractère publicitaire de la bande-annonce à laquelle l’œuvre avait été intégrée a donc permis, une fois n’est pas coutume, de caractériser une atteinte au droit moral de l’auteur.

Il est donc prudent et plus que recommandé, avant tout usage susceptible de porter une atteinte matérielle ou contextuelle à l’œuvre, de solliciter l’autorisation de l’auteur.