Dans un jugement du 21 janvier 2022, le Tribunal judiciaire de Paris a estimé que les slogans « Rien à faire, c’est la Maaf qu’il [ou elle] préfère ! » et « C’est la Maaf que je préfère » utilisés par la célèbre mutuelle d’assurance ne contrefaisaient pas la chanson « C’est la Ouate ».
Faits et litige
La société MAAF a longtemps utilisé, dans ses publicités télévisées, l’air et une partie des paroles du refrain de la chanson « C’est la Ouate » interprétée par la chanteuse Caroline Loeb dans les années 80.
Le refrain « De toutes les matières, c’est la ouate qu’elle préfère » devenait ainsi, dans le cadre de la promotion des services de la MAAF : « Efficace et pas chère, c’est la Maaf que je préfère ».
Cette utilisation avait été autorisée par les titulaires des droits d’auteur sur cette œuvre et était contractuellement encadrée depuis le début des années 2000. Cet accord a toutefois pris fin en 2019.
Postérieurement à la rupture de ce contrat, la mutuelle d’assurance a continué d’utiliser des expressions similaires, notamment « Rien à faire, c’est la Maaf qu’il préfère ! » et « C’est la Maaf que je préfère », sans toutefois reprendre l’air du refrain de la chanson.
Les auteurs et compositeurs de la chanson litigieuse, estimant que cette utilisation constituait une adaptation non autorisée de leur œuvre, ont assigné la Maaf en contrefaçon de droits d’auteur et parasitisme.
Solution : pas de contrefaçon ni de parasitisme
Dans un premier temps, le Tribunal judiciaire de Paris a considéré que la chanson « C’est la Ouate » était une œuvre originale.
Concernant ensuite la matérialité des actes de contrefaçon, le Tribunal rappelle que la contrefaçon ne peut être retenue lorsque les ressemblances reprochées « relèvent de la reprise d’un genre et non de la reproduction de caractéristiques spécifiques de l’œuvre première. »
Or, selon les juges parisiens, d’une part la mélodie de la chanson « C’est la Ouate » qui avait longtemps accompagné la phrase litigieuse n’était plus utilisée par la MAAF dans ses publicités.
D’autre part, seule avait été conservée la chute de la phrase, c’est-à-dire le verbe « préférer » conjugué à la première ou à la troisième personne.
Ainsi, pour le Tribunal, « cette seule reprise ne peut être considérée comme la contrefaçon de l’expression litigieuse dans sa combinaison originale. »
Les demandes en contrefaçon sont donc rejetées.
Il était par ailleurs reproché à la MAAF d’avoir commis des actes de parasitisme pour avoir tiré profit sans bourse délier d’une valeur économique d’autrui lui procurant un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements (définition du parasitisme).
Le Tribunal relève d’abord que la valeur économique de la phrase « De toutes les matières, c’est la Ouate qu’elle préfère » est indéniable, son utilisation ayant été conditionnée au paiement de plusieurs centaines de milliers d’euros en près de 15 ans.
Il constate également que l’utilisation de la phrase « rien à faire c’est la MAAF qu’il/elle préfère » traduit la volonté de la MAAF de maintenir le lien avec la campagne précédente qui a grandement contribué au succès de ses services.
Toutefois, pour les juges « ce seul slogan ne peut, en l’absence d’association avec la mélodie, être considéré comme une valeur économique attribuable aux auteurs de la chanson « C’est la Ouate » dont il ne reprend que les seuls mots « c’est la () qu’elle préfère » sur lesquels Mme Y. et M. Z. ne peuvent exiger de se voir reconnaître un monopole. »
Par ailleurs, la notoriété du slogan de la MAAF est le fruit de ses propres investissements et non de ceux des auteurs.
Les demandes fondées sur le parasitisme sont donc rejetées.