Une simple demande d’enregistrement de marque n’est pas contrefaisante

Dans un arrêt du 13 octobre 2021, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en affirmant que le seul dépôt d’une demande d’enregistrement d’une marque (identique ou similaire à une marque antérieure) n’était pas contrefaisant.

On rappelle que l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle prévoit qu’est interdit l’usage dans la vie des affaires d’un signe identique à une marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée.

Est également interdit l’usage dans la vie des affaires d’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.

De tels usages illicites sont constitutifs d’actes de contrefaçon.

Jusqu’à présent, selon la jurisprudence, le seul fait de déposer à titre de marque un signe rentrant dans l’une de ces définitions (signe identique ou similaire à la marque antérieure + produits désignés identiques ou similaires + risque de confusion) suffisait à caractériser un acte de contrefaçon (et donc d’un usage illicite de la marque imitée ou reproduite).

Dans son arrêt du 13 octobre 2021, la Cour de cassation revient sur cette analyse.

Elle énumère d’abord distinctement les conditions de l’acte de contrefaçon de marque en rappelant que le titulaire de la marque peut interdire :

  • un usage dans la vie des affaires,
  • sans son consentement,
  • d’un signe identique ou similaire à sa marque,
  • pour désigner des produits identiques ou similaire à ceux visés par sa marque,
  • si cet usage est susceptible de créer un risque de confusion dans l’esprit du public (ce dont il résulte alors une atteinte à la fonction de la marque, qui est de garantir la provenance d’un produit ou d’un service).

La Cour en conclut que la seule demande d’enregistrement d’un signe à titre de marque (dépôt devant l’INPI par exemple) ne peut caractériser un usage de ce signe dès lors qu’il n’y a eu aucune commercialisation de produits ou de services sous ce signe.

Le seul dépôt de la marque n’est donc pas, en lui-même, contrefaisant.

Cela ne signifie évidemment pas qu’un tel dépôt est licite et le titulaire de la marque antérieure pourra toujours s’opposer à l’enregistrement ou faire annuler la marque postérieure lorsqu’elle a déjà été enregistrée.

Mais il ne pourra plus assigner le déposant en contrefaçon de marque ni solliciter d’indemnisation sur ce fondement.