Un modèle enregistré n’est pas nécessairement un modèle protégé

Lorsqu’un modèle (l’apparence d’un produit en trois dimensions) est déposé auprès d’un office de propriété industrielle (INPI en France, EUIPO au niveau de l’UE,…), ce dernier ne procède qu’à une vérification sommaire de la régularité du dépôt avant son enregistrement.

Les critères de fond de validité du modèle ne sont pas examinés par l’office.

Ainsi, ni la nouveauté ni le caractère propre/individuel du modèle ne sont étudiés, bien que la validité du titre de propriété intellectuelle délivré et du monopole d’exploitation qui en résulte dépende de ces conditions.

Seule une recherche d’antériorités adéquate permettra au déposant de s’assurer, autant que faire se peut, de la disponibilité du modèle dont le dépôt est envisagé. Or, la plupart des déposants ne procède pas à une telle vérification de disponibilité.

La validité du modèle enregistré sera ainsi présumée, mais cette présomption pourra bien entendu être renversée.

C’est la raison pour laquelle un modèle apparaissant comme enregistré (par exemple lorsque son titulaire communique sur cette protection à des fins commerciales) ne sera pas nécessairement un modèle bénéficiant d’une protection effective.

Ainsi, dans de nombreux cas, la validité du modèle enregistré pourra être remise en cause.

Par exemple, lorsqu’une entreprise se verra reprocher la commercialisation d’un produit dont l’apparence a fait l’objet d’un dépôt, celle-ci pourra opposer au demandeur l’existence d’antériorités de nature à invalider son titre (en « détruisant » sa nouveauté).

Cela sera notamment le cas lorsque le modèle invoqué a été divulgué avant la date de son dépôt.

A titre d’exemple, dans une décision récente, le Tribunal de l’Union européenne (Affaire n° T538/20 du 17 novembre 2021) a jugé nul un modèle de serviette en papier déposé en janvier 2007, au motif que celui-ci avait été divulgué pour la première fois dans un livre publié en 1945 aux États-Unis, lequel demeurait en vente sur la plateforme Amazon (ouvrage d’un magicien consacré au pliage de serviettes).

En conséquence, pour le Tribunal, le modèle déposé en 2007 et enregistré depuis 14 ans n’était pas nouveau. La nullité du titre a donc été confirmée par les juges.

Il est donc important pour le créateur ou l’exploitant de faire procéder à une recherche d’antériorités par un professionnel de la propriété intellectuelle avant tout dépôt.

Quant aux entreprises qui craignent de contrefaire un modèle enregistré, ou qui sont mises en demeure de cesser l’exploitation d’un produit dont l’apparence serait protégée, elles doivent garder à l’esprit que la validité du titre qui leur est opposé peut souvent être contestée.

Pour toute question en relative au droit des dessins et modèles, vous pouvez me contacter à l’adresse nb@bressand-avocat.fr ou au 06 37 48 10 81.